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Vicky Samson
Vicky Samson
  • J'ai seize ans, je suis élève dans un lycée américain, je suis amoureuse du petit copain de ma pire ennemie et je ne sais pas manger un sandwich proprement - vous croyez que c'est facile à assumer, tout ça ?
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30 septembre 2005

II - RAY ET CASSANDRA

Les insinuations malsaines de ma chère Amber Jane ne me causèrent guère d’inquiétude ce soir-là. Penchée sur une leçon d’histoire pour le lendemain, j’avais tant de mal à me concentrer que vers neuf heures, je décidai, pour une fois, de laisser tomber. De toute façon, plus rien ne comptait pour moi. J’étais sur un petit nuage. Inutile de préciser que je croyais dur comme fer que Ray se moquait bien de mes progrès en chimie ; il était clair qu’il n’avait trouvé que ce moyen de m’approcher et que, finalement, nous ne ferions que bien peu de chimie. Ou alors, plus tard.

Je finis par m’apercevoir que malgré l’heure avancée, je n’avais pas encore dîné. D’ailleurs je n’avais même pas eu faim. A ma grande surprise, j’étais seule dans l’appartement. Carrie avait dû sortir, comme presque tous les soirs, mais elle ne m’avait même pas appelée pour me prévenir. J’avais allumé la télé et végétais devant l’écran, l’esprit complètement ailleurs, quand mon téléphone portable sonna.

« Vicky, c’est Gladys Bertolli, fit une voix acidulée.

‑ Oh, salut » lançai-je. Gladys était une assez bonne copine à moi, une rouquine pleine d’énergie que j’appréciais surtout pour son sens de l’humour mais que je prenais également pour une petite gaffeuse sans cervelle. La raison de son appel devait me le confirmer.

« Voilà, reprit-elle, un peu gênée. En fait, j’ai oublié mon bouquin d’histoire au bahut et j’ai déjà plein de retard dans mon boulot. Je m’étais promis d’avancer un peu ce soir, surtout pour le devoir de vendredi… » Je fis la grimace. Je l’avais complètement oublié, celui-là ! Il fallait à tout prix que je me remette à bosser. « … Je me demandais si tu pouvais me prêter le tien. Tu es ma dernière chance, Vicky ! J’ai déjà demandé à Dorothy et à Mark, mais ils m’ont dit qu’ils comptaient réviser toute la soirée… Je t’en prie, accepte !

‑ Mais il faut que je travaille, moi aussi ! protestai-je.

‑ Arrête ! s’exclama-t-elle dans un éclat de rire. Pour toi, c’est de la rigolade ! Tu n’auras qu’à relire tout ça jeudi soir. Tu as une mémoire d’éléphant et jamais aucun problème pour tout retenir ! S’il te plaît, dis-moi oui !

‑ OK, Glad, soupirai-je, tu as gagné. De toute façon je n’ai pas tellement la tête à revoir ça ce soir. Passe le prendre quand tu veux.

‑ Tu es géniale, Vicky, mais… mes parents sont sortis et je suis seule à la maison avec Tommy. » Tommy, le petit frère de Gladys, n’avait que deux ans. « Il n’est pas question que je le laisse. Ça ne te dérangerait pas de m’apporter ton bouquin ? »

J’en étais stupéfaite. Elle ne manquait pas d’air, elle ; les Bertolli n’habitaient pas précisément à côté de chez moi et il n’y avait plus de bus sur cette ligne à partir de huit heures et demie. « Ça va, grommelai-je. Tu as juste intérêt à me faire un énorme café pour quand j’arriverai. »

Mon livre sous le bras et les mains dans les poches, je marchais déjà depuis plus d’un quart d’heure quand je longeai un petit bar sombre et bruyant. La porte s’ouvrit à mon passage et deux personnes sortirent derrière moi. Je pressai le pas mais leurs rires idiots m’étaient familiers. Il s’agissait des deux filles les plus haïssables du lycée : Cassandra Kent, qui était dans ma classe, et Ruby Peeron, son acolyte de douzième. Elles m’apostrophèrent avec une telle insistance que je ne pus que me retourner.

« Salut, les filles, dis-je froidement en apercevant leurs silhouettes de gamines anorexiques et vulgaires.

‑ Hey ! piailla Cassandra étrangement fort. Où cours-tu comme ça, Petit Chaperon Rouge ? Tu n’as pas deux minutes pour entrer avec nous ? »

Qu’est-ce qui lui prend ? me demandai-je. Elle m’a toujours détestée, je doute qu’elle ait la moindre envie de boire un verre avec moi !

« Arrête, Cassandra, dit l’autre, apparemment plus lucide. Tu vois bien que Vicky est très pressée.

‑ Dommage, soupira Cassandra en s’approchant de moi. Oh, mais qu’est-ce que je vois là ? » Elle agrippa mon bras et trébucha. Je dus l’attraper par l’épaule pour l’empêcher de tomber. « Un livre d’histoire ! » Elle eut un rire hystérique. « Je parie que tu vas réviser toute la soirée, hein ? Une bonne élève comme toi… Trois jours avant le devoir ! Il est grand temps de s’y mettre, tu as raison ! » Elle puait tant le mauvais alcool que je me demandai si elle ne venait pas de vomir. Ou alors, de se parfumer à la tequila.

« Viens, bon Dieu ! cria soudain Ruby. On y va, maintenant !

‑ OK, OK. Bon, Vicky, rentre bien, Petit Chaperon Rouge, bégaya Cassandra. Et travaille bien, surtout… » Elle bredouilla encore quelques mots incompréhensibles et fit demi-tour.

C’est alors que ça se produisit. Tout se passa si vite que je ne fus pas certaine, sur le coup, d’avoir bien vu ; mais la suite des événements ne devait que trop me certifier que je ne m’étais pas trompée.

Pendant que Cassandra était venue s’écrouler à moitié dans mes bras et me parler des révisions d’histoire, un garçon était sorti du café et échangeait deux mots avec Ruby. Il me tournait le dos. Je ne distinguais sous l’obscurité, sous le néon rose et vert de la façade, qu’une masse de cheveux clairs savamment décoiffés. Lorsque Cassandra fut revenue près d’eux, Ruby la poussa dans le dos pour la faire avancer devant elle. Mais voyant qu’elle titubait dangereusement, le type blond poussa un grand soupir, se toucha le front de la main et lui passa un bras autour des épaules. Il la tenait contre lui si tendrement que je ne pouvais avoir aucun doute sur la nature de leur relation. Alors, pendant une fraction de seconde, il tourna la tête vers moi – et je reconnus Ray Thomas.

à suivre...

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